Alain Licari _ L’album de Monsieur Soumah, une histoire de la Guinée.

Alain Licari _ L’album de Monsieur Soumah, une histoire de la Guinée.

Alain LICARI : Je suis né en France (Lyon), j’ai vécu quelques années en Espagne et j’ai travaillé à New York de 2015 à 2020. Depuis septembre 2020, je suis installé à Conakry (Guinée).

Photographe autodidacte, je suis inspiré par la photographie humaniste et sociale en noir et blanc, et plus particulièrement par de grands maîtres tels que Raymond Depardon, Sebastiao Salgado, Mary Hellen Mark, Dorothy Lange ou encore Danny Lion et Eugène Smith.

Mon travail photographique s’articule essentiellement autour de personnes et de communautés qui vivent à la marge du système ou dont la vie quotidienne peut prendre une valeur universelle. Je m’immerge au plus près d’elles, nous partageons de longs moments ensemble ; j’observe et je cherche la bonne distance pour témoigner, être le passeur de ces histoires qui interrogent l’actualité et nos modes de vie.

Ma démarche photographique s’apparente au documentaire dans la mesure où je prends le temps de produire mes séries, de retourner régulièrement sur les lieux photographiés. Cela me permet d’approfondir un sujet, de l’explorer sous différents angles et d’en observer l’évolution dans le temps. Mais je m’attache aussi à produire une photographie esthétique en apportant un soin particulier au cadrage et à la composition souvent inspirés par le cinéma.

Mon travail photographique est régulièrement exposé en France et à l’étranger (États-Unis, Italie, Chili, Macédoine, Guinée…), sélectionné par des galeries et des festivals.

© Alain Licari

« Je suis Monsieur Soumah, je suis Guinéen et j’ai 82 ans. Enfin, je crois. L’officier d’état civil a demandé à mon père quand je suis né, et lui, il a dit une date comme ça. Parce que vous savez, dans les villages, on enregistrait les naissances quand on pouvait. Alors oui Monsieur Alain, je suis né vers 1942.

Ces trois bâtiments ont été construits avec l’usine Péchiney, en 1958 au moment de l’indépendance, quand Sékou Touré a dit « Non ! » à De Gaulle. Il ne s’y attendait pas, le Vieux ! Il en a même oublié son képi.

Avec ma famille, je suis venu à Fria en 1959 quand j’avais 17 ans. J’ai eu une belle vie ici, vous savez. Nous avions tout le confort moderne : eau, électricité, ascenseurs, caves… Toutes les commodités. On ne trouvait pas ça en Guinée. Même pas à Conakry ! Et puis le temps est passé. Les gouvernements, les multinationales. Les cours de bourses, aussi. Et nous, on est restés. On est là.

Ah, que de souvenirs ! Maintenant, je dois être le plus vieux du quartier. On me connait bien, ici. J’ai encore quelques amis, des photos de l’époque.

Laissez-moi vous montrer, Monsieur Alain »

© Alain Licari