Virginie Nguyen Hoang _ Prix Camille Lepage 2024

Virginie Nguyen Hoang _ Prix Camille Lepage 2024

Virginie Nguyen Hoang © Lillo Mendola

Née en Belgique, Virginie NGUYEN HOANG a étudié le journalisme à l’IHECS (Bruxelles) et le photojournalisme à l’École danoise des médias et du journalisme (Danemark).

En 2012, elle a rejoint l’agence Hans Lucas, est devenue cofondatrice du collectif HUMA et a déménagé en Égypte jusqu’en 2014 en tant que freelance, mais aussi comme photojournaliste pour les journaux locaux Egypt Independent, puis Mada Masr.

À travers ses photographies, elle vise à raconter des histoires, en particulier celles portant sur l’exclusion sociale et les conséquences des conflits sur les populations locales. Depuis le début de sa carrière, Virginie a réalisé plusieurs reportages en Belgique, mais aussi en Syrie, en Égypte, en Irak, en Turquie, en Libye, en Ukraine, au Vietnam, aux Philippines, en Afghanistan, en Inde, en Malaisie, en Côte d’Ivoire, à Gaza, en Méditerranée et en République centrafricaine. Elle est maintenant basée à Kyiv, Ukraine.

Virginie collabore avec de nombreux journaux et magazines internationaux et a reçu plusieurs prix internationaux, dont le Prix ANI-PixTrakk 2018 au festival international de photojournalisme Visa pour l’Image pour son reportage Gaza, the aftermath, le Prix de la Citoyenneté 2019 de la Fondation P&V, le VISA d’Or de l’information numérique 2023 au festival Visa pour l’Image pour son web-documentaire Ukraine: la vie sous le feu de la guerre et dernièrement, le Prix Camille Lepage 2024 avec son reportage au long court en Ukraine  Grandir, trop vite, à Kharkiv.

L’association Camille Lepage – On est ensemble décerne depuis 2015 un prix aux photographes engagé(e)s dans un projet au long cours. Ce prix doté de 8OOO€ est remis durant le festival  » Visa pour l’image. Depuis 2017 la Société des auteurs des arts visuels et de l’image fixe (SAIF) s’engage aux côtés de l’Association Camille Lepage – On est ensemble pour financer le prix.

En mars 2022, Dmytro, 68 ans, et sa petite-fille Diana, 10 ans, ont trouvé refuge dans le métro suite à des bombardements et de la prise de leur village, Ruzka Lozova (situé à 20 km de Kharkiv), par les Russes. Vétéran de la guerre en Afghanistan et ancien mineur du Donbass, Dmytro élève seul Diana depuis sa naissance. « Son père est inconnu et sa mère, ma fille, ne s’occupe pas d’elle. Elle a des problèmes d’alcoolisme et de drogue… », confie-t-il. Lui-même est diminué par un AVC.  Malgré une accalmie relative des bombardements sur Kharkiv durant l’été 2022, ils ont ensuite connu des mois de galère pour trouver un endroit où vivre.

Diana, de son côté, entrait progressivement dans l’adolescence.

Diana et Dmytro, dans la partie d’un wagon du métro de Kharkiv qui leur sert de chambre. Le 13 avril 2022. © Virginie Nguyen Hoang

À l’approche des deux ans de guerre, leur détresse s’est aggravée. Dmytro sombrait dans la dépression, tandis que Diana s’infligeait des entailles : « C’est pour éviter les crises de panique. »

En janvier 2024, elle fête à peine ses 12 ans. Elle abandonne ses cours en ligne, ne voyant plus l’intérêt d’étudier tandis que Dmytro, affaibli, peine à s’occuper d’elle. L’adolescente trouve du réconfort auprès de nouveaux amis de son quartier, dont Katia, sa meilleure amie. Mais en août 2024, son grand-père est hospitalisé et jugé inapte, par les services sociaux, à élever Diana. il est envoyé en maison de retraite, et Diana est placée en centre de réhabilitation pour enfants, en attente d’une adoption.

Séparée de son grand-père et de ses amis, le monde de Diana s’effondre alors que les bombardements s’intensifient sur Kharkiv. Les attaques depuis Belgorod, en Russie, se multiplient et une offensive russe se profile au nord de la ville.

Ce reportage au long cours évoque non seulement la guerre, mais surtout ses répercussions sur le quotidien et l’état psychologique d’une petite fille devenue adolescente en plein conflit.
Déjà abandonnée par ses parents à sa naissance, Diana voit son destin bouleversé par la guerre. Au fil des mois et des années, j’ai suivi cette petite famille pour montrer l’évolution de la vie de Diana et les effets encore invisibles d’un conflit sur une existence qui aurait pris un tout autre tournant si la guerre n’existait pas. En 2025, Diana fête ses 13 ans, mais cette année marque également trois ans d’invasion russe en Ukraine. Ce récit témoigne du poids invisible d’une guerre sur une jeunesse contrainte de grandir trop vite.

Kharkiv: Diana et Dmytro se rendent à un centre de réhabilitation et refuge pour chats rescapé du front. Diana souhaite adopter un chat avec l’accord de Dmytro, le 1er Juillet 2024. © Virginie Nguyen Hoang