Fondateur et Directeur artistique du Studio de Photographie Moureaux à Montpellier, le photographe William MOUREAUX a été reconnu par ses pairs au niveau national et international. Les nombreuses récompenses obtenues à travers le monde l’attestent. Sa particularité, c’est qu’il n’a pas de spécialités. Par conséquent, William Moureaux travaille aussi bien dans le portrait, que dans le mariage, la photographie aérienne, sous-marine, industrielle, commerciale, événementielle.
- 2017 – Master Qualified European Photographer (MQEP)
- 2019 – Meilleurs Ouvriers de France, option photographie d’art
Portraitiste de France, mais aussi conférencier international, son nom est aujourd’hui une signature, synonyme d’excellence.
Adhérent et membre du bureau national de la FFPMI (Fédération Française des Photographes et des Métiers de l’Image), grâce à sa fonction de responsable de la Commission Images, il est en charge de l’organisation du concours de Portraitiste de France décerné tous les deux ans. De par ses fonctions au sein de l’organisation professionnelle et les titres obtenus, il est aussi une référence dans le monde des professionnels de la photographie, puisque William Moureaux est régulièrement juge pour différentes compétitions nationales : Portraitiste de France, Concours Européen de l’Été des Portraits.
Après plusieurs sélections en Équipe de France de la Photographie, dans diverses catégories, il est depuis 2016, Capitaine de l’Équipe de France. Une médaille d’argent en 2019, obtenue en Norvège, lui a permis d’avoir été une fois de plus reconduit sur ce poste pour l’année 2020. Aujourd’hui formateur, la transmission et la défense de ce métier deviennent essentielles. Mis à mal avec l’apparition du numérique, la photographie doit retrouver l’importance qu’elle avait auparavant.
..EXPOSITION BARROBJECTIF 2021 : Renaissance..
Être photographe ?
Transcrire, et retranscrire, encore, l’image d’une réalité au millième de seconde. Pas d’avant, ni d’après, ou alors l’image est une autre. Cet instant, arraché au temps, devient membre actif des mémoires. Son empreinte, cette trace lumineuse demeure. Dioptries, diaphragmes… En miroir, ces rencontres peuvent aussi me marquer à vie. À chaque mission, mon œil collé à celui de l’objectif devient un filtre, offre un regard indirect. Récemment installé dans un nouveau studio, j’ai rencontré Isabelle, une femme différente, hors du commun, marquée au fer rouge de la vie. Je le sens dès le premier regard.
Isabelle me dit qu’elle souhaiterait réaliser une séance de prise de vue en studio. « C’est mon métier », lui dis-je un peu naïvement. Elle voulait une séance de nu. Je lui présente mes différents travaux, très rapidement, elle les balaie d’un revers de manche, me dit que ce n’est pas ce qu’elle recherche. Pourtant, je ne trouve pas mes clichés académiques !
Cette présentation a été brève: Isabelle est une authentique, sans faux semblant, elle va droit au but de sa quête. Elle ne perd pas de temps, marche à l’intuition ou à l’instinct, et m’ouvre illico le livre de sa vie. Sa parole se libère, elle me raconte son chemin jusqu’à moi. Ses mots claquent, tranchent, acérés. Je suis sonné.
Il y a 2 ans, par un matin d’hiver Isabelle dépose sa fille à l’arrêt de bus. « À ce soir ma chérie ! ». Une mère, une fille adolescente, leur quotidien. Elle la quitte pour rejoindre son emploi. Chacune a sa route toute tracée. Un homme percute l’arrêt de bus. Une personne est gravement blessée. On l’appelle, on la prévient. La foudre s’abat sur elle, la sidérant. La fille d’Isabelle est gravement touchée. Les jambes. Ses blessures ne guériront pas. En un instant, tout a basculé, en une seconde le monde s’est décomposé comme la lumière dans un prisme. Les couleurs ont fondu et le monde s’est tu. Le savoir, l’évoquer… mais le vivre…
Ce bouleversement métamorphique après l’avoir pétrifié va engendrer une autre Isabelle, à la vie troublée, marquée par des sortes de pertes de conscience. Toujours sous l’emprise de la douleur, elle me fait le récit des mois qui suivirent. Sa psyché et son corps se transforment. Elle fond, perd 20 kg, se défait, se déconstruit, se remodèle. Elle découvre en elle, dans sa nécessité de survivre, des forces insoupçonnées, des capacités pour l’art, notamment le dessin et la musique. Comme si la douleur lui avait fait découvrir des aires de son cerveau ignorées jusque là. Comment l’exprime-t-elle ? Elle est traversée par des moments de « crises “qui se caractérisent par des sortes d’inconscience qu’elle ne s’explique pas. Il lui arrive de dessiner des nuits entières, assise en tailleur sur son lit, prise par une frénésie qui la dépasse.
Pourquoi la photographie ? Cet art est une étape nécessaire, me dit-elle. À ce stade de son histoire, de ses traversées obscures, ce travail est devenu une nécessité. Elle doit s’exprimer devant un photographe.
Rendez-vous est donc pris pour une première séance. Je suis un peu déconcerté. Ses explications sur ses moments de ‘transe ‘m’intriguent. Je me prépare, ainsi que le studio, je cherche la lumière, comme un peintre aux aguets, comme un chasseur de lumen. Isabelle entre, forte et fragile. La séance débute. Je tente de faire poser mon modèle, mais rien ne se passe comme je l’avais imaginé. Mon travail prend une tournure inattendue. Isabelle nue, entre ‘en transe.’ Elle n’a gardé que ses bijoux qui sont ses amulettes, son lien avec la terre, avec son ventre et sa fille. Je perds la communication, elle s’évade du réel. Je vois qu’elle n’est plus là, or sa dimension corporelle qui semble habitée. Ses bijoux produisent des éclats et des reflets. Je suis concentré sur la lumière. Le studio est habité par un silence d’ailes de papillons ; seul le claquement de l’appareil photographique se fait entendre. Elle est entrée en communication, s’exprime avec son corps, semble souffrir silencieusement. Elle se tord, son sang bat aux tempes. Cela dure, une heure au moins, puis, ‘la transe ‘s’achève, elle s’écroule, épuisée. Je suis bouleversé. Isabelle est prostrée et en pleurs. Je respecte son rythme. J’attends qu’elle reprenne pied dans ce monde, qu’elle retrouve la parole. Je lui témoigne ainsi mon respect. Elle m’avouera quelques minutes plus tard avoir libéré une énergie intense ; mais vécu cela dans un bien-être absolu, comme guidée. Un deuxième rendez-vous est pris. La deuxième séance fut du même ordre, mais avec encore plus d’intensité. ‘Le bonheur complet’ me dit elle, ‘une libération aussi. ’
Je suis toujours très troublé. Je sais que je vis quelque chose d’incroyable, d’extra-ordinaire, presque d’extra-sensoriel.
Plusieurs semaines passent et je n’ai plus de nouvelles d’Isabelle. Je travaille mes images. Comme un livre je les lis et les relis et recommence encore.
Nous ne communiquons plus guère. Et puis, un matin, la voilà ! transformée, métamorphosée même. Elle, qui dissimulait son corps dans des vêtements trop amples, se déplace avec légèreté, parée de vêtements féminins. Elle semble gorgée de lumière et sa sensualité est palpable. Les séances de photographie l’ont libérée et transformée. Elle a retrouvé son énergie vitale, partage des moments heureux avec sa fille qui va mieux. Elle aussi. Elle m’explique comment mon regard sur ces séances exutoires lui a permis de vaincre les démons et les fantômes qui l’habitaient.
Je sais l’étrangeté de cette rencontre, mais Isabelle est réelle, sa transformation est profonde.
Aujourd’hui, je vous offre ce récit, ces images qui interrogent sur ces pratiques de médiation entre les êtres humains et les esprits, les âmes et les dieux ou les confins de la psyché. Ces moments de vie de personnes exceptionnelles dont la douleur a été sublimée.
Je sais aujourd’hui à travers ces images, la part de mon travail dans sa transformation. Je mesure l’alliance de la technique et de ma propre humanité. Nous partageons cette vision. Elle cherchait à s’exprimer, elle a expulsé ses démons. Comme si dans ce couloir de lumière, elle avait trouvé les courants ascendants de sa renaissance.
Corps, chair, champs de bataille Tranchées meurtries où s’abritent les drames Éperdue dans la transe, Où elle appelle une âme. Nue, inaccessible, elle danse. Sa quête est là. Il y a de l’envol pour chaque cicatrice Comme l’oiseau chassé en quête de pâture. Elle s’enflamme, Au-delà des fosses où gisent En clair obscur l’être et la pensée, Habitée par ses gestes comme autant d’aventures. À la fin de l’hypnose, elle jette son cri Une petite mort s’empare de sa vie.