Karine PIERRE commence la photographie en autodidacte fin 2015 et rejoint l’agence Hans Lucas fin 2017. À l’été 2018, elle se consacre exclusivement à la photographie et entreprend une formation tout en continuant de couvrir l’actualité sociale et politique. En 2019, elle décide de concentrer son travail en dehors de l’hexagone. Après Tripoli (Libye) où elle couvre la ligne de front, elle part pour Beyrouth où elle s’installe deux années. Sa série Aftermath (Liban) est projetée au festival Visa pour l’Image en 2021. En 2022, elle est lauréate du Prix Résidence pour la Photographie de la Fondation des Treilles. Elle a reçu aussi la bourse Bourse des Amis du Musée Albert Kahn avec sa série The Shredded Lands (Liban). En 2023, elle reçoit le prix ANI/Pixtrakk au festival Visa pour l’Image avec sa série The Deep Play (Liban). La série Take Me Home!, réalisée au Pakistan avec le soutien du CNAP est projetée au Festival Visa pour l’Image puis elle reçoit le Prix Lucas Dolega / Saif / RSF pour la Liberté de la Presse 2023. Le travail de Karine Pierre a également été finaliste dans divers concours internationaux dont : le Visa d’or du CICR, Bourse Canon de la femme photojournaliste, le prix Roger Pic, La bourse Camille Lepage, Anja Niedringhaus Courage In Photojournalism Awaed / IWMF.
Karine Pierre est membre de Women Photograph.
PRIX, EXPOSITIONS & SÉLECTIONS
2024
- The Shredded Lands : Exposition solo – Beyrouth
Take Me home! - Finaliste Anja Niedringhaus Courage In Photojournalism Award / IWMF
- Finaliste Prix Roger Pic
The Deep Play - Exposition galerie Signatures – Prix ANI / Pixtrakk – Paris
2023 : Take Me Home!
- Lauréate du Prix Lucas Dolega / Saif / RSF pour la Liberté de la Presse
- Projection au Festival Visa pour l’Image
- Finaliste Bourse Camille Lepage
- Sélectionnée Premio Luis Valtuena
The Deep Play - Lauréate du Prix ANI/Pixtrakk – Visa pour l’Image
- Publication portfolio revue 6 Mois & Stern Crime
- Sélectionnée IWPA Award
The Shredded Lands - Exposition collective Galerie Initial Labo (Lauréats du Prix de la Fondation des Treilles)
2022 : The Shredded Lands
- Lauréate : Prix Résidence pour la Photographie Fondation des Treilles, présidé par Jean-Luc Monterosso
- Lauréate des Rencontres Photographiques des Amis du musée Albert-Kahn
- Finaliste Visa d’or du CICR
- Finaliste Bourse Canon de la femme photojournaliste
- Finaliste Prix Roger Pic
- Sélectionnée IWPA Award
- Exposition collective au Musée Albert Kahn
- Exposition solo au Centre pour la Photographie – Gaillac
The Deep Play - Soutien à la photographie documentaire contemporaine / CNAP
2021 : Aftermath
- Projection au Festival Visa pour l’Image
- « Coup de cœur » de l’Association Nationale des Iconographes / Festival Visa pour l’Image
2019 & 2020 idem
- « Coup de cœur » de l’Association Nationale des Iconographes / Festival Visa pour l’Image
- Mention spéciale Prix de la photo politique – Science Po / Vu’ – Exposition collective
EXPOSITION BARROBJECTIF 2024 : Take Me home! _ Pakistan
Ramène-moi à la maison ! Ces mots comme des ritournelles, revenaient vers moi sans fatigue lors de ce temps passé à recueillir ces visages ; ces étendues perforées d’intensités noires, où les yeux sont immenses et les bouches couturées de cris. Ces regards écartelés par le désespoir mêlé à une supplication presque amnésique nous percent et nous laissent sans voix.
Car seul un acte prodigieux serait à la hauteur de ce désir fou, de cette prière qui nous scrute sans pourtant juger de notre impuissance à répondre à cette simple demande qui est de rejoindre les siens : « Take me home! »
Mais quel est donc cet acharnement qui s’exerce sur ces chairs ? Nous pourrions bien croire que ces femmes sont folles, comme nous aimons à les qualifier. Et peut-être est-ce vrai après tout. Mais l’ont-elles toujours été ? Et quand bien même ? Et n’est-ce pas plutôt cet ordre qui, à force de coups, de viols, de négations, d’oppressions tant physiques que mentales, a conduit ces corps et ces âmes à ce point de blessure, ce point de rupture ?
Ici, la société nommera incontrôlable une femme qui éprouve encore malgré les lois, le besoin de franchir les portes enchâssées de lourds barreaux. Ici, le cadenas et la chaîne sont les parures offertes aux fiancées insoumises. Ici, ces Antigone involontaires ne sont plus que des pelures d’héroïnes que l’on écosse jusqu’aux os. Elles sont devenues les fantômes de leurs villes et de leurs villages, le cri vissé dans la poitrine de leurs ombres minuscules.
Toutes répudiées par leurs maris, rejetées par leurs parents ou par leurs belles-familles, ces femmes et ces enfants n’ont d’autres choix que ce nouvel enferment. Souvent victimes d’années de maltraitances, la plupart passeront le reste de leur vie dans ces murs, car pour elles, nulle porte de sortie si un tuteur ne s’en pas porte pas garant. Ainsi, les femmes ne souffrant d’aucune pathologie se verront condamner à y mourir à moins qu’un mariage ne soit arrangé, mais la liste d’attente est longue.
Ce que nous voyons se déployer en ces lieux n’est que l’appendice gangréné d’un dictat établi par les hommes contre les femmes. Ces « refuges » où je me suis rendue n’ont certes pas été conçus ainsi ni même dans ce but, bien au contraire. Mais au fil du temps, comme rattrapé par l’unique référant qui fait loi, à savoir la soumission du sexe féminin, l’abri est devenu carcéral et l’hospitalité, scélérate. Une mécanique donc à l’image de cette société patriarcale pakistanaise, une machine à broyer les femmes croyant les sauver de ce dehors, de cet espace de production réservé exclusivement à l’homme et qui n’est en conséquence, qu’un espace de prédation.
Un vent violent souffle aujourd’hui d’Afghanistan vers la République Islamique du Pakistan. Les femmes, déjà réifiées en ustensiles multi-usages servant tour-à-tour de masse laborieuse abusée et d’accessoires domestiques domptés pour la reproduction, le chemin restant à parcourir vers un asservissement plus définitif encore est à portée de vue. La Terre des Purs, en pleine crise politique et au bord de l’effondrement économique, pourrait bien travestir le chant consumé de ces sirènes martyrisées en un appel à la prédication du pire, à savoir la disparition totale du féminin de l’espace public.
Selon le dernier rapport du forum économique mondiale, le Pakistan occupe la 153e place sur 156 pays concernant la santé et la survie des femmes. 85% des femmes ont souffert de violences conjugales.