Isabel Corthier _ Brotherhood Social Club

Isabel CORTHIER née en 1977 en Belgique est une photographe documentaire indépendante qui travaille à l’international pour des organisations humanitaires telles que Caritas, Trias, Médecins sans Frontières

Je suis fascinée par la force et la résistance des humains pour faire face à des situations difficiles. Dans mon travail, j’aime souligner le pouvoir que les humains peuvent montrer pour survivre et leur créativité lorsque les options sont limitées. En raison de cette vision, mon approche est souvent positive, même dans les situations les plus extrêmes.

Son travail est publié dans National Geographic NL, BBC, El Pais, De Volkskrant, … Elle a remporté plusieurs prix (PX3, SIPA, ND, IPA).
Depuis 2015, Isabel est ambassadrice pour Fujifilm en Belgique.

Expositions Barrobjectif

https://www.isabelcorthier.com/

..EXPOSITION BARROBJECTIF 2021 : Brotherhood Social Club –  Se comporter comme un gentleman.. 

D’une manière originale — et très à la mode — le Brotherhood Social Club lutte contre la criminalité dans sa communauté.

Avec des chaussures cirées, les membres de la Fraternité attendent le début d’une visite de la communauté dans le township de Vrygrond au Cap. Les chaussures, ainsi que leurs vêtements, sont de marques de haute qualité. « Quand vous vous habillez comme un gentleman, vous vous comportez comme tel », telle est la devise. Township Vrygrond, Le Cap, Afrique du Sud © Isabel Corthier

L’Afrique du Sud compte plus de 50 meurtres par jour.
En 2019, le nombre élevé de violences basées sur le genre a été déclaré une crise nationale.

Habillés, de tenues de mode exquises, faisant référence au bon vieux temps — où le respect était une valeur élevée chez les Sud-Africains noirs — les membres du Brotherhood Social Club défilent dans leurs cantons pour repousser l’attitude du crime et réintroduire les bonnes manières.

Pendant les ‘promenades communautaires’ ils abordent leurs frères et sœurs en faisant preuve d’empathie et de camaraderie. Se faire remarquer par leur style vestimentaire exquis et leur énergie positive fait partie de la stratégie du Club: les gens s’intéressent à les rencontrer et à les écouter. Le respect et l’acceptation dans la communauté sont essentiels pour se connecter plus tard avec des individus qui se sont égarés ou qui vivent dans une pauvreté extrême. Étant donné que tous les membres vivent dans des cantons, ils approchent les problèmes de l’intérieur avec une compréhension approfondie de la situation.

Se faire remarquer par leur style vestimentaire exquis et leur énergie positive fait partie de la stratégie du Club : les gens s’intéressent à les rencontrer et à les écouter. Le respect et l’acceptation dans la communauté sont des éléments clés pour se rapprocher plus tard des personnes qui ont pris le mauvais chemin. Tous les membres du Club vivent eux-mêmes dans des townships, ce qui leur permet de s’attaquer aux problèmes en ayant une compréhension approfondie de la situation. Township Vrygrond, Le Cap, Afrique du Sud
Lors d’une des marches communautaires dans le township de Samora Machel au Cap, les membres du Brotherhood Social Club attirent l’attention et la sympathie grâce à leur étonnant style de danse Pantsula. – Fujifilm X-100F© Isabel Corthier

L’idée du groupe est née du désir de revenir au style et au (self-) respect des noirs avant 1994. Le style vestimentaire se réfère au style Pantsula. Il s’agit d’un style de mode et de danse né à l’époque de l’apartheid.

Le Club est un mélange de jeunes et de vieux membres. Bien que les hommes plus âgés obtiennent plus de respect, ils doivent également s’identifier à la jeune génération. Le Club a une page facebook où ils mettent des photos et des vidéos et une chaîne youtube. FB: Brotherhood Social Club National. Beaucoup de jeunes, les prennent comme modèles.

Le 9 novembre 2019, le Club a organisé une grande marche à travers le canton de Weltevreden Valley North au Cap pour l’inauguration officielle du Club et la nomination du président. Le Club compte actuellement plus de 100 membres répartis dans 7 branches à travers l’Afrique du Sud. Ils prévoient de s’étendre au Botswana en 2020.

Avec l’utilisation des médias sociaux, leur présence physique dans la communauté fait d’eux, d’après Isabel Corthier, les véritables influenceurs de l’Afrique du Sud d’aujourd’hui!

Reportage réalisé lors de plusieurs visites entre avril 2019-décembre 2019 dans le canton de Vrygrond et le canton de Weltevreden Valley North au Cap. (Canton = township)

Marie Dorigny_ Népal, le pays qui n’aimait pas les femmes

INVITÉE D’HONNEUR EN 2002

BIOGRAPHIE

Photo-reporter depuis 30 ans, Marie Dorigny, 59 ans, a d’abord travaillé en tant que journaliste rédactrice. Elle a rejoint la photographie en décembre 1989 lors de la révolution roumaine et a réalisé depuis des reportages engagés sur le travail des enfants, la condition des femmes ou les formes contemporaines d’esclavages.

Son travail, publié dans la presse nationale et internationale, a également été exposé à maintes reprises, dans les galeries photos de la FNAC (l’esclavage domestique), au Festival Visa pour l’Image de Perpignan (travail des enfants et accaparement des terres), en passant par la Bibliothèque Nationale de France (prostitution et immigration clandestine) ou encore le Muséum de Lyon (Cachemire).

Son dernier travail en date, « Displaced, femmes en exil », un reportage réalisé sur commande, en 2016, pour le Parlement Européen, a été exposé durant trois mois à Bruxelles par le Parlementarium ainsi qu’à Visa pour l’Image.

Parmi les récompenses qui lui ont été attribuées, on peut citer :

  • 1991 : un World Press pour son reportage sur les ravages de l’Agent Orange au Vietnam
  • 1998 : le Prix Kodak du jeune photo-reporter pour son travail sur l’esclavage domestique
  • 2013 : elle est lauréate d’une bourse du festival « Photoreporter en baie de St Brieuc », pour un projet de reportage sur les violences faites aux femmes au Népal
  • 2014 : lauréate de la bourse photo AFD/Polka pour son projet « Main basse sur la terre » sur l’accaparement des terres arables dans le monde, travail exposé par la suite à la MEP (Maison Européenne de la Photographie)

Trois monographies présentent également son travail photographique :

« Enfants de l’ombre » aux Éditions Marval, 1993, « Cachemire, le paradis oublié » aux Éditions du Chêne, 2004 et enfin, « L’inde invisible », Éditions CDP, 2008.

Photographe Marie Dorigny © Yonnel Leblanc

EXPOSITION DES 20 ANS DE BARROBJECTIF : Népal, le pays qui n’aimait pas les femmes

En 2009, une étude du ministère de la santé népalais révélait que la première cause de mortalité chez les femmes âgées de 15 à 49 ans était le suicide. Ce triste résultat fait du Népal un cas unique au monde.

Dans l’ancien royaume himalayen, les formes de violences traditionnelles à l’égard des femmes sont légion : violences domestiques, discriminations spécifiques comme le chaupadi , qui les relègue les femmes dans les étables durant les périodes de menstruation, infériorité juridique, consacrée par le fait que seuls le père ou le mari peuvent décider de donner la citoyenneté à leur fille ou épouse. Sans leur bon vouloir, une Népalaise n’a pas même d’existence légale. Dans les provinces de l’ouest du pays, les plus arriérées, plus de 60% des femmes sont dans ce cas.

Le gouvernement central a complètement négligé le développement du Sindhu Palchowk. Le district manque cruellement d’infrastructures de base. Accéder aux rares services de santé est très compliqué pour les femmes qui doivent souvent marcher durant des heures avant de trouver un poste de santé. Certaines arrivent le jour de leur accouchement sans avoir jamais vu un médecin. Golce, Sindhu Palchowk, Nepal 2013.

Mais à ces atteintes anciennes se superposent de nouvelles menaces liées à la situation délétère du pays. Valse des gouvernements, corruption endémique, vide constitutionnel… Depuis la fin de la guerre civile et la chute de la monarchie en 2006, le Népal est en proie à une instabilité chronique. Dans ce chaos politique et institutionnel, la pauvreté et les trafics en tous genres prospèrent, dont les femmes sont devenues les premières victimes.

Minées par l’incurie des autorités en matière de développement économique, et par les premiers effets du réchauffement du climat, les campagnes se vident. Dans des régions entières, les villages ont été désertés par les hommes, partis travailler en Inde ou dans les pays du Golfe. Livrées à elles-mêmes, les femmes croulent sous le double fardeau des tâches domestiques et des travaux agricoles, sur fond d’insécurité alimentaire grandissante (25% de la population est désormais concernée).

Quand elles prennent le chemin de l’exil avec leur famille, c’est pour finir dans les bidonvilles qui se multiplient autour de Katmandou, où chômage et alcoolisme nourrissent la violence domestique.

La misère n’alimente pas simplement les mouvements migratoires, mais aussi le trafic d’êtres humains, dont les femmes sont aussi les premières cibles. Trafic international en pleine expansion : des milliers de Népalaises étaient déjà vendues aux bordels indiens chaque année ; avec l’apparition de nouveaux réseaux mafieux, elles finissent désormais jusque dans ceux du Golfe et de l’Asie.

Trafic interne aussi : elles sont désormais des milliers à vendre leur corps dans les bars et salons de massage de la capitale, alors que la prostitution y était jusque-là quasi inexistante. Une nouvelle source d’inquiétude pour les ONG qui craignent que le Népal devienne la prochaine destination phare pour le tourisme sexuel.

Face à cette situation, ONG et société civile s’organisent, avec souvent des femmes en première ligne : avocates luttant contre l’inégalité juridique, travailleuses sociales gérant des foyers d’aide à la réinsertion des anciennes prostituées, brigade de policières spécialisées dans la violence domestique se battent au quotidien pour leurs concitoyennes… Mais toutes ces initiatives constituent encore de faibles remparts, face à cette vague féminicide.

Marie Dorigny/Marie-Amélie Carpio

Marie Dorigny – Népal, le pays qui n’aimait pas les femmes

Après une première carrière de rédactrice, Marie Dorigny, 54 ans, a rejoint le monde de la photographie en décembre 1989, à l’occasion de la révolution roumaine.

portrait marie dorigny

Ses reportages sur le travail des enfants, les formes contemporaines d’esclavage ou la condition des femmes dans les pays en voie de développement ont depuis été publiés dans la plupart des journaux et magazines de la presse internationale.

La Bibliothèque Nationale de France a présenté son travail sur les filières d’immigration clandestine et de prostitution, en 2006, dans le cadre de l’exposition

« Pour une photographie engagée ».
Marie Dorigny travaille également, en parallèle, sur des projets plus personnels, comme celui sur le Cachemire, région où elle s’était rendue pour la première fois en 1991. Elle a publié, en 2004, aux éditions du Chêne : « Cachemire, le paradis oublié ». Ces photos ont été exposées au Museum de Lyon et au Centre de Culture Contemporaine de Barcelone, dans le cadre de l’exposition thématique « Frontières » (2007).Elle a reçu en 1991 un World Press pour son reportage sur les ravages de l’Agent Orange au Vietnam et le Prix Kodak du jeune photoreporter en 1998.

Elle est lauréate du Festival Photoreporter en baie de St-Brieuc, qui lui a attribué en 2013 une bourse pour documenter l’exode rural et les violences contre les femmes au Népal. Ce travail, exposé à St-Brieuc en octobre 2013 vient d’être publié dans l’édition française de National Geographic (numéro de juin 2014).

Son dernier projet en date porte sur l’accaparement des terres arables dans les pays émergents. Ce travail documentaire sera réalisé en partie avec le soutien de l’Agence Française de Développement, qui a attribué à Marie Dorigny la bourse photo AFD 2013.

Exposition BarrObjectif 2009 : Une Inde sans-terre

EXPOSITION BARROBJECTIF 2014 : Népal, le pays qui n’aimait pas les femmes
Marie Dorigny/Marie-Amélie Carpio

En 2009, une étude du ministère de la santé népalais révélait que la première cause de mortalité chez les femmes âgées de 15 à 49 ans était le suicide. Ce triste résultat fait du Népal un cas unique au monde. Dans l’ancien royaume himalayen, les formes de violences traditionnelles à l’égard des  femmes sont légion : violences domestiques, discriminations spécifiques comme le « chaupadi », qui les relègue dans les étables durant les périodes de menstruation, infériorité juridique, consacrée par le fait que seuls le père ou le mari peuvent décider de donner la citoyenneté à leur fille ou épouse. Sans leur bon vouloir, une népalaise n’a pas même d’existence légale. Dans les provinces de l’ouest du pays, les plus arriérées, plus de 60% des femmes sont dans ce cas.

Mais à ces atteintes anciennes se superposent de nouvelles menaces liées à la situation délétère du pays. Valse des gouvernements, corruption endémique, vide constitutionnel… Depuis la fin de la guerre civile et la chute de la monarchie en 2006, le Népal est en proie à une instabilité chronique. Dans ce chaos politique et institutionnel, la pauvreté et les trafics en tous genres prospèrent, dont les femmes sont devenues les premières victimes.

©Dorigny-Marie01

Minées par l’incurie des autorités en matière de développement économique, et par les premiers effets du réchauffement du climat, les campagnes se vident. Dans des régions entières, les villages ont été désertés par les hommes, partis travailler en Inde ou dans les pays du Golfe. Livrées à elles-mêmes, les femmes croulent sous le double fardeau des tâches domestiques et des travaux agricoles, sur fond d’insécurité alimentaire grandissante (25% de la population est désormais concernée). Quand elles prennent le chemin de l’exil avec leur famille, c’est pour finir dans les bidonvilles qui se multiplient autour de Katmandou, où chômage et alcoolisme nourrissent la violence domestique.

La misère n’alimente pas simplement les mouvements migratoires, mais aussi le trafic d’êtres humains, dont les femmes sont aussi les premières cibles. Trafic international en pleine expansion : des milliers de Népalaises étaient déjà vendues aux bordels indiens chaque année ; avec l’apparition de nouveaux réseaux mafieux, elles finissent désormais jusque dans ceux du Golfe et de l’Asie. Trafic interne aussi : elles sont désormais des milliers à vendre leur corps dans les bars et salons de massage de la capitale, alors que la prostitution y était jusque-là quasi inexistante. Une nouvelle source d’inquiétude pour les ONG qui craignent que le Népal devienne la prochaine destination phare pour le tourisme sexuel.

©iDorigny-Marie-02

Face à cette situation, ONG et société civile s’organisent, avec souvent des femmes en première ligne : avocates luttant contre l’inégalité juridique, travailleuses sociales gérant des foyers d’aide à la réinsertion des anciennes prostituées, brigade de policières spécialisées dans la violence domestique se battent au quotidien pour leur concitoyennes… Mais toutes ces initiatives constituent encore de faibles remparts, face à cette vague féminicide.

Patrick Bard _ Invité d’honneur 2010

Patrick Bard est né en 1958 à Montreuil-sous-Bois. Photojournaliste, romancier, écrivain-voyageur, il a notamment travaillé sur la banlieue, les frontières et les routes. Son premier roman, « La frontière », a reçu le prix Michel Lebrun (2002), le prix Brigada 21 (Espagne, 2005) et le Prix ancres Noires 2006. Membre de la Maison de photographes signatures-photographies.com, il mène un travail personnel sur la problématique de l’eau en Amazonie et sur les peuples autochtones des Amériques. Son travail photographique a été exposé au Centre Pompidou, à la Grande Halle de la Villette, mais aussi au Mexique, en Espagne, en Angleterre, aux États-Unis…
Avec son épouse, Marie-Berthe Ferrer, il arpente l’Amérique Latine depuis de nombreuses années. Ses œuvres ont été acquises par plusieurs musées et collections privées.

EXPOSITION BARROBJECTIF 2010 : Femmes sacrifiées du Guatemala

Au 31 décembre 2008, plus de 3 500 femmes avaient été assassinées au Guatemala depuis 2000. Parce qu’elles étaient des femmes. Un crime qui porte un nom : le fémicide. Violées, torturées, abattues – parfois pour voler leurs enfants -, victimes de violences de tout type, les femmes du Guatemala sont surexposées à la folie meurtrière des hommes, au point qu’en mai 2008, le président Alvaro Colom nouvellement élu a fait adopter une loi qui fait du « crime de genre » une circonstance aggravante en cas d’homicide. Comment en est-on arrivé-là ?

1978 : le général Lucas Garcia arrive au pouvoir. Les peuples Mayas représentent plus de la moitié des 8 millions de Guatémaltèques. Affamés, ils réclament des terres dont ils ont été spoliés. Les militaires préfèrent la voie du sang à celle du partage. Sur plus de 4 millions d’indigènes, 250 000 sont exterminés au prétexte d’une lutte anti-guérilla. 640 communautés Mayas sont rayées de la carte. L’armée combat son propre peuple. Ces massacres sont accompagnés de campagnes de viols planifiés. De 40 à 50 000 femmes sont abusées, réduites en esclavage sexuel dans des casernes. Sur 5 victimes des violences du conflit, 4 sont des femmes. 1996 : l’armée dépose les armes. Les casernes sont démantelées. Les militaires regagnent les villes et se recyclent par milliers : entreprises de sécurité privée, police, crime organisé. Les passerelles entre ces trois domaines sont nombreuses et la police est corrompue et violente. À partir de la fin des années 90, les cartels mexicains s’installent au Guatemala. Les gangs, les « Maras », venus des USA, s’enracinent en Amérique Centrale. Ils ont le meurtre pour rite d’initiation et tuent les femmes du gang d’en face pour attenter à la virilité de l’ennemi. Tout comme l’armée avec les Mayas.

Si la guerre est finie, le corps des femmes demeure un champ de bataille. Une vague de violence fémicide frappe désormais le pays, surtout en milieu urbain, et surtout les femmes des milieux modestes, plus exposées. Le sinistre décompte commence en 2000. Avant, la statistique ne distinguait pas le sexe des victimes d’homicides. Au Guatemala, à peine 2% des meurtres sont punis. Qui tue les femmes ? En 2005, les ONG ont étudié la typologie des fémicides, attribuant 27% des meurtres au « Maras » et 22% à la violence domestique. Reste 51% des assassinats inexpliqués, la majorité. Impossible de ne pas penser à ces psychopathes formés au massacre, au viol, relâchés dans les villes, sous un uniforme de policier, de vigile, recyclés en narcotrafiquants. Difficile de ne pas évoquer un continuum entre politique génocidaire (une procédure pour actes génocidaires est en cours en Espagne contre les responsables du conflit) et fémicide contemporain. Ici, les femmes meurent. Parce qu’elles sont des femmes. Mais elles résistent aussi. Un combat difficile, car 2010 sonne comme le sinistre anniversaire de l’ouverture d’une « chasse aux femmes » sans précédent en Amérique Centrale.

Patrick Bard & Marie-Berthe Ferrer

Éric Bouvet _ Invité d’honneur 2008

Né le 16 mai 1961 à Paris.
Après des Études à l’école Estienne Éric Bouvet devient en 1982, reporter photographe à l’agence Keystone. Puis, de 1983 à 1990, à l’agence Gamma. Depuis 2004 il est indépendant avec VIINetwork
Ses deux pays de prédilection sont l’Afghanistan et la Tchétchénie. Dans chacun d’eux, il s’est rendu au moins une dizaine de fois.
Il a couvert également les conflits internationaux et les grands événements comme les funérailles de Khomeiny, la chute du mur de Berlin, la révolte étudiante de Tien An Men à Pékin, la libération de Mandela en Afrique du Sud, les funérailles de Rajiv Gandhi, les Jeux Olympiques de Séoul, la chute du Concorde à Goussainville, le tremblement de terre en Algérie …
Il a obtenu de nombreux prix dont le Visa d’Or du Festival du Photo-journalisme de Perpignan Groznyï, Tchétchénie (2000) et le Prix du Correspondant de Guerre – Bayeux Groznyï, Tchétchénie (2000) et plusieurs World Press Photo : 2éme prix natures séries – Gaz toxiques, Cameroun (1987) ; 1er prix news features – Les funérailles de Khomeiny (1990) ; deuxième prix spot news – La guerre du Golfe (1991) ; 3éme prix news stories – Commandos Russes, Tchétchénie (1995).

EXPOSITION BARROBJECTIF 2008 : Les commandos Russes d’infiltration et de renseignements en Tchétchénie

Je suis parti de Grozny depuis une semaine, avec une soixantaine d¹hommes sur 8 blindés. Je n’ai que sept pellicules diapo dans mon sac.

Sur les contreforts des montagnes du Caucase, nous attendons depuis deux jours. La pluie inonde la ruine censée nous protéger. Le peu de murs tremblent sous les coups de butoir de l’artillerie qui s’est positionnée près de là. Pour le repas journalier, la gamelle noire passe de mains en mains. Au menu : la vache égorgée deux heures plus tôt.

Départ, et consigne pour l’assaut de la colline de nuit. Les chars progressent, mais s’enlisent dans la montée. La progression se fait à pied, sous les tirs d’obus Russes qui nous passent par-dessus la tête. Des tirs Tchétchènes nous accueillent. Les deux soldats qui m’entourent répondent où ils peuvent, ça tire un peu dans tous les sens. Je baisse la tête, j¹ai l’air malin avec ce foutu appareil photo sur le ventre en pleine nuit, encore une situation incontrôlable, tout m’échappe. Les balles sifflent et déchirent le feuillage au-dessus de nous. Bienvenu dans l’épicentre de la folie, à quatre pattes j’essaye de me cacher, un de mes protecteurs me pose carrément sa botte sur mon dos pour que je reste couché. Il m’indique un trou dans lequel je me jette. Je n’entends plus rien tant les armes dégueulent leurs rafales. Mon protecteur ne cesse de vouloir sortir la tête, mais doit replonger illico, car la fusillade est d’une intensité incroyable. Soudain, il se dresse, et tire avec son RPG, je le croyais blessé, car il se tortillait comme un diable, en fait c’est la déraison qui le prend au corps. Il sort une nouvelle fois pour décharger son arme avec frénésie. Impossible de me blinder par le travail, la trouille est plus qu’installée, je suis passé dans une autre dimension, au-delà de la conscience, au-delà de la raison. J’ai l’impression de ressentir le choc des balles, la lumière aveuglante des explosions et le bruit intolérable des déflagrations. Pour être totalement dans la réalité, le Major se penche sur moi. Me crie « Bolchoï problem » ce qui peut se traduire par « grand problème » et me tend un revolver. Il veut absolument que je le prenne. Je refuse de la tête. Il insiste, mais je ne peux accepter cette arme. La prendre c’est reconnaître que je suis partie prenante dans cette tuerie. Je hais la guerre.

© Éric Bouvet

Je n’ai jamais toléré l’idée même de la guerre et j’ai toujours refusé de porter une arme. Jamais je n’ai été aussi convaincu de mes décisions qu’à cet instant même. Le major disparaît et je reste effondré dans mon coin, tout cela veut dire que nous sommes foutus, je n’ose pas le croire. Ces Russes sont surarmés, il est impossible de perdre, et toi ma super chance, où es-tu?

© Éric Bouvet


Soudain, un soldat me saisit par le dos et m’arrache de mon trou. Il me tient en l’air d’une seule main comme une poupée de chiffon et de l’autre il lâche des rafales de la mitrailleuse 12,7 d’une vingtaine de kilos qu’il brandit comme un jouet. Avant qu’il ne me balance dans un autre trou, j’aperçois son visage dans l’éclat d’une explosion. Il est couvert de boue et de sang, il hurle des mots incohérents. Dans ses yeux exorbités, luisants de haine se reflète une jouissance abominable. Le souffle de l’explosion nous projette.
Le trou dont je viens d’être expulsé est arrosé par une pluie d’éclats. Ce chien de guerre vient de me sauver. J’éclate de rire, mes nerfs me quittent, les hommes qui m’entourent sont transformés en bêtes sauvages luttant pour leur survie, quant à moi je ne suis plus rien, juste une loque, une merde, un tas de conneries. À ce moment-là, je n’ai qu¹une idée, m’enfoncer dans cette boue, je creuse avec mes mains. J’ai l’impression que tout le monde me voie. Je voudrais me cacher, m’enfouir, disparaître. Comme je n’y arrive pas, j’abdique et m’allonge sur le dos pour regarder ce ciel merveilleux plein d’étoiles filantes. Je suis parti pour marcher sur la Voie lactée quand un big-bang éclate près de moi. Je retrouve mes esprits en recevant quelque chose de chaud sur le visage. Il me faut me protéger, je prends donc mon petit sac photo en toile, le vide du matériel, et l’ajuste sur ma tête. Je suis enfin à l’abri, « allez y entre-tuez vous » pensais-je, « tuez, tuez, tuez-vous tous que le sang gicle que les corps se vident et pourrissent que plus rien n’existe, faites table rase sur cette démence ».

© Éric Bouvet


Il ne peut plus rien m’arriver au milieu de cette fureur, car je ne suis plus là, parti chez moi je cherche désespérément le visage de ma femme qui ne m’apparaît plus. Brune, c’est le seul trait dont je me souviens. Je suis dans un espace sans temps, un espace où la vie et la mort ne font plus qu’un, j’abandonne, plus rien n’a d’importance, j’oublie de vivre.

Au petit matin je me réveille et découvre des corps étendus un peu partout. Deux morts ont été allongés l’un à côté de l’autre et beaucoup de blessés geignent. J’essaye de les photographier, mais c’est difficile, car il n’y a pas assez de lumière, de plus ils refusent de se laisser prendre. Ils tournent la tête en me repoussant d’un geste du bras. Je n’insiste pas. Il y a cette scène que je ne peux photographier, un soldat pleure devant la dépouille de son ami, le mort n’a plus de visage, il a dû se prendre un morceau de roquette, méconnaissable. Les familles recevront un cercueil en zinc scellé. Puis son compagnon le couvre d’une couverture et me voit hébété, je ne suis pas à ma place, ce n’est pas ma guerre, je ne peux rien dire rien faire. Il se lève, reprend un sourire carnassier, ses yeux pleins d’eau et de pitié se transforment en éclairs pleins de haine. Il m’entraîne et me montre le cadavre d’un Tchétchène encore plus amoché, même défiguration, mais en plus une ouverture béante à la place du ventre. Le soldat russe heureux de cette vengeance, décroche quelques coups de pied rageurs au corps sans vie, et pour finir crache dessus. Nous sommes tous devenus fous, chacun à sa façon.

© Éric Bouvet


Je mesure la distance qui sépare le cadavre, de mon trou dans lequel j’ai passé la nuit, il n’y a que quatre mètres, c’en est trop je ne veux plus rien comprendre ni analyser, c’en est fini, il me faut revivre et laisser tout cet enfer en dehors de ma vie. Il faut que je me purifie. Je trouve une flaque d’eau et me frotte le visage pour enlever les plaques de boue et de sang qui me maculent. Parce que j’ai la gorge en feu, parce que j’ai trop soif, je bois cette eau saumâtre… Geste imbécile que je regretterai pendant plusieurs années.

© Éric Bouvet
© Éric Bouvet


Le major donne de nouvelles instructions. Les vingt-six blessés dont dix graves sont dirigés vers l’arrière en compagnie des cinq morts roulés dans des couvertures. Je fais le décompte, sur la soixantaine, un homme sur deux a été touché, ma super bonne grosse étoile ne m’a donc pas abandonné… La chance, il ne faut pas en abuser, et si j’avais du courage, je partirais avec les blessés. Mais la chance c’est aussi de pouvoir faire ce reportage unique. Deux heures plus tard, une contre-attaque Tchétchène réveille les soldats épuisés par une nuit de combat.
C’est reparti, ça défouraille à tous va, mais cette fois il fait jour et je peux enfin travailler. Mais au bout de 10 minutes, les assaillants s’enfuient. À moins de deux Kms plus bas dans la vallée nous les voyons embarquer dans un camion. Le capitaine russe rit de leur erreur et monte dans la tourelle du blindé, pour se servir du lance-missile téléguidé. L’obus part, durant quelques secondes nous pouvons suivre sa progression, guidés par le tireur c’est comme un jeu d’enfant. Le camion explose, deux hommes sautent, l’un ne se relève pas, l’autre se cache dans un bosquet. Deuxième missile, la cache vole en poussière ainsi que les hommes qui s’y croyaient protégés. Les Russes applaudissent les qualités de tireur du capitaine, moi je viens de voir la mort en direct. Tout à l’air calme, nous pouvons progresser vers le village. Dans les bois des tireurs embusqués continuent de nous harceler. Trop dangereux, il nous faudra faire un détour qui durera toute la nuit. Sur le chemin, les chenilles du blindé écraseront un cheval. Deux bruits ignobles, celui de la carcasse broyée et l’autre du ventre qui éclate pour libérer les viscères gonflés.
 
Au lever du jour nous arrivons aux abords du village. Le convoi s’arrête à distance respectable et sont envoyés les cosaques comme éclaireur nettoyeur. Presque tout le monde s’endort dans l’herbe, réchauffés enfin par le soleil revenu. Quelques coups de feu réveillent le major qui grogne d’envoyer quelques hommes en appui aux cosaques. Je somnole, impossible de décompresser. Trop de questions me viennent à l¹esprit. À quoi bon faire ce foutu métier ? Pourquoi prendre tant de risque ? Pour dénoncer les horreurs de ce monde ? Pour cette belle utopie qu’est le témoignage journalistique ? Ou tout simplement pour l’ego ? La vérité est peut-être un mix de tous ces faits, et c’est si dur de se l’avouer. Ma conscience me crache toute crue la vérité.

Je m’en veux de m’ouvrir les yeux. Que suis-je venu chercher ici ?
 
Deux heures plus tard, les cosaques reviennent avec différends trophées, une télévision, des coussins de canapés, des boîtes de conserve, deux oies, un caméscope, une marmite en fonte, un sac de riz, des poules, un sac de noix, bref la caverne d’Ali Baba. La cerise sur le gâteau c’est un prisonnier. Presque à chaque pas le tchétchène tombe, relevé à coups de pied, il a le visage tuméfié, quelques coups de crosses le poussent dans son ascension vers l’enfer. Les habits déchirés, blessé au bras, il était caché dans une maison. Comment se fait-il que ses compagnons l’aient abandonné ? Son regard ne quitte pas le ciel, il doit savoir qu’il est déjà mort, moi je ne le sais pas encore. Les trophées sont enfoncés dans les blindés, la télévision trop grosse ne rentre pas, le sac de riz s’écorche et se répand par terre, les oies ne se laissent pas faire et pincent, une fois les portes arrière refermées ce sont les poules qui se sauvent par le sas du conducteur, c’est n’importe quoi.

L’interrogatoire du tchétchène commence. L’homme s’agenouille, il est jeune, le même âge que ceux qui le questionnent. Il fait partie du groupe qui a mené la contre-attaque la veille sur la colline, et a reçu une balle dans le bras. Les Russes sourient de satisfaction. Le tabassage commence et chacun y va de bon cœur, seulement des coups de pied, car on/ils ne veulent pas se salir les mains. Battu sur tout le corps, la tête, le ventre, le dos, les parties, l’homme geint tout en regardant le ciel. Devant ma surprise mêlée de dégoût, l’un d’eux m’explique que c’est ce tchétchène qui a tué ses camarades russes là-haut, que c’est normal qu’il meure… Le major se rend compte de ma stupéfaction et fait emmener le prisonnier à quelques mètres de là au bord du précipice, l’un des soldats suit tout en vissant son silencieux au bout de son pistolet.
Le prisonnier hurle quelques mots, une petite détonation sourde et sèche met fin à une vie. Le Russe revient en se frottant les mains de haut en bas comme après un travail bien fait. Je suis avec des assassins. Pourtant je le sais qu’il n’existe pas de guerre propre, ce n’est qu’une belle utopie des politiciens, qui sont à mille lieues d’imaginer ce que veut dire ce mot horrible : Guerre.
 
Un soldat hurle, en montrant du doigt au loin un homme marchant dans un champ avec ses moutons. Un blindé part à sa poursuite et le ramène cinq minutes plus tard. Quarante ans, le chapeau tchétchène sur la tête.
Questions, cigarettes, réponses, le petit jeu dure vingt minutes, puis un long silence s’installe. L’homme reste calme, il n’a pas l’air inquiet le berger, moi je le suis pour lui, ce n’est pas un combattant, mais certainement un sympathisant comme quatre-vingt-dix pour cent de la population, pourrait-on lui reprocher, c’est sa terre, sa famille est de ce village, quoi de plus normal ? Mais j’avais oublié que je n’étais plus dans la normalité depuis quelques jours, et l’homme est emmené vers le bosquet près du précipice, il a juste le temps de comprendre, l’arme fût plus rapide que sa voix, par deux fois le son étouffé du silencieux claquât, rideaux.
Elle aurait pu être belle cette journée, le ciel est pourtant bleu.

Nous prenons possession de l’école qui va nous servir pendant quelques jours de camp retranché. Les attaques nocturnes sont fréquentes. Le pire ce sont les beuveries. Et quand il n’y a plus de vodka, c’est du spirit à 90°.

Un colonel débarque à l’improviste, furieux il réveille les soldats, je ne comprends pas ce qu’il dit tellement il gueule fort, je me cache dans une armoire pour éviter le pire. Dans l’embrasure de la porte, je scrute les réprimandes sur la tenue du campement, il fait aligner tout le monde au garde à vous. C’est vrai qu’au niveau vestimentaire il y a comme un laisser-aller, un certain mélange de cour des miracles et de soirée drag queen. L’un est en pyjama rose, l’autre en chemise hawaïenne, un autre a des chaussons de femmes brodés de petites perles scintillantes, celui-ci un tissu tchétchène décoré de fleurs portées façon toge romaine, celui-là une robe de chambre pourpre, un sous off en slip…Du fond de ma cachette, je pouffe de rire, je regrette de ne pouvoir immortaliser le tableau.

Une nuit, un coup de feu est tiré du couloir, je décide de ne pas bouger pensant à une querelle ayant mal tournée. Au petit matin dans l’entrée, deux soldats penchés sur une forme s’invectivent, il fait encore sombre. En fait c’est un homme qui baigne dans son sang au milieu des grains de maïs d’un sac éventré. Ses membres sont désarticulés par les traumatismes, un râle inhumain me glace le sang. J’y suis, le coup de feu de cette nuit, c’était la balle logée dans sa cuisse. Le prisonnier est jeune, son visage est méconnaissable, j’aperçois des fils qui sortent de sa bouche, la main du soldat russe actionne une manivelle à l’autre bout du branchement, « la chose » se débat du peu de force qui lui reste, la manivelle tourne de plus en plus vite, le corps est secoué de tremblements et un son inimaginable sort de cette bouche déformée par la souffrance. Le tortionnaire s’aperçoit de ma présence, me tend la main afin de me saluer, le contact me glace le sang jusqu’au plus profond de moi-même. Il me demande si je vais bien, que je n’ai pas l’air en forme, complètement médusé je ne peux ni répondre ni bouger. La gégène continue de fonctionner et l’homme qui n’en est plus un, bave des sons de souffrances, inaudibles à l’oreille humaine. Je n’en suis pas à mon premier conflit, j’ai vu pas mal de saloperies, je ne me fais aucune illusion sur les tortures infligées dans les geôles de chaque camp du monde entier. Mais là, je suis devant, j’assiste à cette violence pure sans artifice, la mort finit son travail lentement, tout est calme autour de nous, la vie ne veut pas se lever ce matin-là.
Je cours vomir.
Je hais mes appareils photo, c¹est à cause d’eux que je suis ici.
 
Le lendemain des cris et des coups me réveillent, je découvre des hommes ivres de rage détruisant tout ce qu’ils trouvent. Le commandement ordonnait le repli du groupe sur Grozny suite aux accords avec Bassaïev durant sa prise d’otage à Boudonnosk. Je suis aux anges, mon billet retour se présente sous forme de défaite pour le major et ses hommes, moi je vois cela plutôt d’un bon œil, eux prennent très mal cette décision. Convaincus d’avoir gagné cette guerre, ils doivent piteusement battre en retraite. Ils noient leur frustration dans la vodka.

Le lieutenant s’évertue à planter son couteau sur un portrait du président Doudaëv. Un soldat déchire les vêtements qui nous ont si bien servis. Un autre se défoule à la hache sur les fenêtres et portes d’une maison. Un accordéon local voltige dans les airs. Un malheureux chien la queue basse termine son chemin sous une rafale. Hurlements et bouteilles vides, la haine continue son œuvre sur ce pauvre village. Tout est vandalisé, une fumée s’échappe d’un toit, puis deux, quelques maisons s’enflamment. Il me faut appuyer sur le déclencheur de mon appareil photo, mais je m’en fous, je suis ailleurs, déjà parti et installé sur un des blindés j’attends qu’ils finissent leurs bases œuvres. Je doute d’un coup de ces hommes, la folie va-t-elle les conduire plus loin que l’imaginable.

L’on vient me chercher pour partager un dernier trophée, les quatre soldats sont ivres, le trésor de guerre est une femme ! Je fais semblant de ne plus pouvoir bouger à cause de mon pied blessé, l’un deux me répond en me montrant son sexe que c’est plus de cela que l’on a besoin dans le cas présent. Je me refuse d’y croire, j’ai oublié qu’il manquait le viol au tableau de chasse. Le fond est touché, je planque mes appareils photo, ce n’est plus la peine d’essayer quoi que ce soit, la situation glisse vers l’incontrôlable.

Deux heures plus tard, la colonne démarre enfin, je me retourne et laisse derrière moi cet enfer, au loin devant, m’attend ma famille.
 
 
ÉRIC BOUVET
Reporter Photographe