INVITÉ D’HONNEUR EN 2015
BIOGRAPHIE
Olivier Laban-Mattei est membre permanent de l’Agence M.Y.O.P. depuis 2013.
Il a commencé à travailler comme photojournaliste indépendant en 1999 après des études de géographie et de sociologie. Il devient correspondant de l’AFP en Corse, d’où la famille Mattei, du côté de sa mère, est originaire.
Après dix ans à l’AFP, couvrant les événements mondiaux (guerres en Irak, Gaza, Géorgie, insurrection en Iran, tremblement de terre en Haïti, cyclones à Java et en Birmanie), Olivier Laban-Mattei se tourne vers la photographie indépendante. Tout en continuant à suivre certains sujets d’actualité (le printemps arabe, la guerre en Libye), il se concentre désormais sur des projets à long terme. Pour « The Mongolian Project« . Olivier a voyagé plusieurs fois en Mongolie avant de s’y installer pendant un an. Le projet a abouti à un livre, Mongols (Neus, 2013), et à une exposition « Mongolia, the Eldorado does not exist » présentée à Visa pour l’Image en 2014. Il dépeint Oulan-Bator comme une ville proche de l’asphyxie, qui connaît une expansion débridée tout en vivant sous la menace permanente d’un séisme. Un deuxième livre est actuellement en production.
Olivier Laban-Mattei travaille également à de nombreuses reprises avec le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). En 2014 et 2015, il a rendu compte de la crise centrafricaine et des traumatismes liés aux conflits.
Son travail a reçu plusieurs prix, dont trois World Press Awards, deux Paris Match Awards, deux Pictures of the Year International (POYi).
EXPOSITION POUR LE 20 ANS DE BARROBJECTIF 2019 : L’Eldorado n’existe pas
Il n’y a aucun doute là-dessus : La Mongolie n’est pas une terre bénie par les dieux, une terre riche qui offre des richesses à tout chasseur de fortune, comme les médias internationaux voudraient nous le faire croire. Bien au contraire. Alors que les ressources minières ont pu apporter de vastes richesses financières à l’État, les inégalités sociales ont été considérablement aggravées par l’exploitation minière intensive, avec de graves effets sur la santé humaine et l’environnement. Et les premières victimes sont les Mongols. La pollution de l’air, de l’eau et de la terre, le manque d’hygiène et d’assainissement et les problèmes de santé se sont aggravés. Les autorités refusent de reconnaître les faits, déterminées à promouvoir une image idyllique du pays afin d’attirer toujours plus d’investisseurs et de touristes étrangers.
Depuis la fin du régime communiste, depuis que la Mongolie s’est tournée vers la démocratie et l’économie de marché, de nombreuses entités publiques se sont effondrées faute de financement continu. Le système de santé et le système éducatif, qui s’effondrent tous deux, sont des exemples du mépris de l’État pour ces secteurs et de son manque d’intérêt à mettre en œuvre une politique de développement véritable et durable au profit de la population.
La corruption a miné toutes les composantes de la société. Elle peut être très organisée, comme c’est le cas dans les échelons supérieurs où les décisions sur les ressources minérales apportent des fortunes personnelles aux quelques élus, ou pour les classes moyennes, elle peut être un moyen de survivre avec de faibles salaires. Avec l’inflation galopante et l’augmentation constante du coût de la vie, ce système sournois est maintenant bien établi. Ironiquement, à mesure que les capitaux affluent des sociétés minières qui contribuent à la richesse du pays, la pauvreté s’est répandue et est maintenant endémique dans les deux villes et dans la steppe. La promesse électorale d’une part de la richesse du pays n’a pas été tenue et le mécontentement se fait jour.
Depuis le début des années 2000, de nombreuses communautés ont abandonné les zones rurales pour la ville, surpeuplant Oulan-Bator, le centre économique et politique du pays. Chaque année, 60 000 autres migrants s’installent à la périphérie de la ville. Avec les embouteillages dans le centre-ville et l’utilisation généralisée du charbon pour le chauffage, c’est aujourd’hui l’une des villes les plus polluées du monde.
Dans les zones rurales, la situation n’est guère meilleure. Dans certaines régions, les pratiques traditionnelles d’élevage ont été abandonnées au profit de systèmes d’élevage intensif, dans le seul but d’en tirer un profit immédiat, et sans tenir compte des conséquences de l’empiétement du désert sur des vallées entières et de la mise en danger des écosystèmes par les mines, comme dans le désert de Gobi où les nappes phréatiques peuvent se tarir.
La situation est urgente. La Mongolie doit réagir, développer une politique de développement durable large et diversifiée, tout mettre en œuvre pour éviter que l’exploitation minière ne prenne le relais et soutenir d’autres secteurs susceptibles de créer des perspectives d’emploi.
Avec une population de moins de trois millions d’habitants, un tiers seulement travaillant et beaucoup souffrant de graves problèmes de santé, il est difficile de comprendre pourquoi l’État ne s’intéresse pas davantage aux populations si essentielles à la croissance et au développement national.
La Mongolie est aujourd’hui un pays fragile, comme la capitale elle-même, en équilibre sur une faille sismique et menacée de destruction.